Ce qui est incroyable, c’est que le matin-même de l’accident, ma mère a appelé le CFA, pour leur dire que je travaillais dans des conditions dangereuses ! Elle a eu au bout du fil le gars qui s’occupe des relations avec les apprentis. Ma mère m’a dit que le gars ne s’est pas trop inquiété, il a répondu que je pouvais utiliser mon droit de retrait de toute façon. Le lendemain j’ai prévenu le CFA de mon accident, et le gars a appris ça, donc il m’a appelé, paniqué ! En fait, le CFA est autant responsable que l’employeur. Et je pense que le gars savait qu’il pouvait être mis en cause. Donc j’ai été le voir pour qu’il me trouve une autre boîte dans laquelle travailler. Mais il n’a pas trouvé. Un an avant, un jeune du CFA, un charpentier, est décédé en tombant d’un toit, ce n’est pas rassurant.
En as-tu parlé avec la direction de ta boite ?
Juste après l’accident le conducteur de travaux a été informé, puis le soir, j’ai laissé un message vocal à mon patron en lui disant que je me rendrais chez médecin le lendemain. Il m’a rappelé, mais je n’ai pas répondu, je n’avais pas envie de m’entretenir avec lui, je ne voulais plus de contacts avec cette boîte. Ça m’a dégoutté, j’ai failli mourir à cause de lui ! Lui, il fait son fric, moi, j’ai failli mourir pour son intérêt ! Je n’avais vraiment aucune envie de retourner travailler dans cette boîte, encore moins si je risque ma vie. A ce moment-là, j’étais en colère, je leur en voulais !
Comment ça se passe dans ta nouvelle boîte ?
Ça n’a rien à voir, ça se passe bien. Je n’ai pas encore travaillé sur un chantier mais j’ai envie d’y retourner pour en connaître la réalité, aussi pour rencontrer les collègues qui y travaillent. Pour le moment, j’ai fais un mois dans les bureaux. Je leur ai dit que j’étais tombé il y a peu et que mon ancienne boîte ne me plaisait pas. Et ce que j’ai entendu, c’est que la sécurité est carrée avec eux. Il y a une personne, c’est son boulot de passer sur les chantiers pour vérifier si la sécurité est respectée. Ca devrait être une base partout… On sait que c’est pas facile d’ouvrir sa gueule quand on est en bas de l’échelle, quand on est salarié, ouvrier. Je trouve qu’il y a une cassure entre les gens des chantiers et ceux des bureaux, les deux se méprisent, ne communiquent jamais. C’est deux mondes différents et c’est compliqué qu’ils marchent bien ensemble. Alors je me suis dit que si je travaillais un peu dans les bureaux et un peu sur les chantiers, ça fonctionnera mieux.
On sait que c’est pas facile d’ouvrir sa gueule quand on est en bas de l’échelle…
As-tu déjà entendu parler de syndicalisme ?
Oui, ma mère est à fond là-dedans. Mais moi je n’aime pas me prendre la tête. Pour mon accident, j’aurais pu faire un procès mais je n’en ai pas envie. Je suis conscient que ça peut arriver demain à quelqu’un d’autre malheureusement et que je devrais le faire pour éviter ça. Mais finalement tout le monde devrait le faire. Moi je ne suis pas prêt à faire ça, à y consacrer de l’énergie, sans être sûr du résultat.
As-tu eu la possibilité de contacter un syndicat dans ta boîte ?
Moi je ne connaissais pas vraiment avant, c’est ma mère qui m’a expliqué qu’est-ce qu’était un syndicat. Pour moi quand on me parle de syndicat je vois la CGT. Mais sans savoir ce que c’était pour autant. Et puis je n’ai pas envie de me battre pour les Autres, mais je trouve que la démarche est bien sinon.
Qu’as-tu pensé des rapports entre hommes/femmes au travail ?
Je n’ai pas vu de femmes sur le chantier. Il n’y a qu’une seule fille au CFA dans ma classe, elle est en menuiserie.
L’ambiance entre les gars te plaît ?
C’est lourd, je préférerais qu’il y ait des filles. Au CFA c’est 95 % de gars. On se retrouve donc qu’entre mecs. Souvent on entend que c’est pas une branche faite pour les femmes car c’est physique mais elles aussi peuvent le faire, mais elles sont exclues. On associe et réduit le bâtiment à des « bourrins » mais c’est aussi un métier très précis. Dans la tête des gens c’est tellement un métier d’hommes que les femmes n’ont pas envie d’y venir travailler, et je peux comprendre que ça donne pas envie ! Finalement, je pense que les femmes ne veulent même pas s’approcher tellement c’est rempli de mecs !
Pour plus d’infos sur les accidents du travail, on vous conseille :
En tant qu’ouvrier·ère·s du bâtiment on est habitué·e·s à entendre nos collègues dire que les sécurités « c’est chiant » ou que « ça ne sert à rien ».
Beaucoup d’ouvriers du BTP sont imprégnés par une culture viriliste et pense que le danger fait partie du métier. Que seuls les peureux demandent à travailler en toute sécurité…
Bien que nous désapprouvions ces comportements, nous mettons en garde celles et ceux qui seraient tentés de se tromper de cible.
Un problème de formation.
Pourquoi les ouvrier·ère·s de la construction ne sont pas sensibilisé·e·s aux risques du métier au même titre que les automobilistes sont sensibilisé·e·s aux risques de la route?
Si on leur montrait des photos de collègues après une chute de plusieurs mètres, après avoir pris un bloc de béton sur la caboche, après avoir été empalé par une pelleteuse…
Si ils·elles avaient conscience qu’à tout moment il·elle·s risquent de ne pas rentrer à la maison le soir, après leur journée de taf, il·elle·s seraient plus prompts à exiger les équipements de sécurité.
Les patron·ne·s ne fournissent pas non plus les formations suffisantes en matière de sécurité, tout particulièrement dans les petites ou moyennes boîtes. Les organismes de formation (lycée, CFA, …) portent aussi une lourde responsabilité en ne sensibilisant pas suffisamment leurs apprentis sur ces questions.
C’est pour cela que nous médiatisons les accidents du travail dans le secteur de la construction.
En Gironde, de juillet à octobre 2018, nous avons comptabilisé au moins 5 morts, dont un jeune apprenti charpentier décédé suite à une chute de plusieurs mètres.
Les conditions de travail.
Les cadences excessives et la course au profit ne laissent pas le temps aux ouvrier·ère·s de travailler de façon sécure. C’est pourquoi nous appelons systématiquement l’inspection du travail pour signaler des des manquements en matière de sécurité. Notamment en charpente, car la moindre erreur peut être fatale.
Notre syndicat intervient dès qu’il le peut. En clair, si les patron·ne·s ne respectent pas la législation, nous utiliserons tous les moyens à notre disposition pour les y contraindre.
Les patron·ne·s rechignent à sécuriser les chantiers parce qu’il·elle·s considèrent que c’est une perte de temps et d’argent. Autrement dit, il·elle·s considèrent que ça coûte moins cher de remplacer les ouvrier·ère·s, quand il·elle·s sont mort·e·s ou « cassé·e·s », que de sécuriser un chantier.
Donc, ne leur faites pas confiance pour savoir comment prendre soin de vos vies !
Samedi 21 mars 2020, des membres du gouvernement et des représentants de syndicats patronaux du BTP se sont réunis afin de relancer l’économie de ce secteur malgré la crise sanitaire actuelle et le confinement, liés à l’épidémie de la Covid-19. Depuis ce matin (lundi 23 mars) nous apprenons que de nombreux chantiers sont en train de reprendre leur activité.
Évidemment ces dirigeants, qui ne mettront jamais un pied sur les chantiers, annoncent que des mesures de protection seront prises pour éviter tout risque de contamination. Nous ne sommes pas dupes et savons que cela va provoquer de nouveaux malades voire des mort-es. De plus, le matériel de protection (qui est si rare) doit servir au personnel soignant qui tente de sauver les vies que nos dirigeants contribuent à mettre en péril.
En temps normal, les ouvrier-e-s du BTP se blessent et meurent tous les jours sur les chantiers du fait de conditions de travail déplorables. Alors aujourd’hui, encore plus qu’hier, nous ne faisons pas confiance au gouvernement et au patronat pour nous garantir le « travail en toute sécurité ». Qui plus est, si l’un-e d’entre nous venait à se blesser, comment se faire soigner dans des services hospitaliers saturés?
On est tous dans le même bateau?
Dans sa propagande quotidienne, le patronat clame haut et fort qu’il supporte « tous les risques ». La situation actuelle illustre une nouvelle fois que ce sont bien les travailleur-se-s qui doivent en fait les assumer.
Alors vous, les ministres et les patrons, qui décidaient pour nous ce qui est dangereux ou non et comment faire notre métier, dites-nous comment nous rendre sur les chantiers à plusieurs dans le même camion, installer une chaudière, refaire une charpente, monter une cloison en placo à 2, manger à 8 dans un cabanon de 6m2, tout ça en respectant le plus simple des gestes barrière c’est-à-dire en étant à 1m de distance ? Comment pouvez-vous exiger que nous retournions au travail alors que tout le corps médical demande de rester chez soi ?
Nous y voyons uniquement du mépris et de l’indifférence quant aux conséquences sur la santé des ouvrier-e-s. Il est irresponsable de multiplier les risques que l’épidémie se développe encore plus vite et à plus grande échelle. Avec cette stratégie c’est bientôt la construction de crématoriums qu’il va falloir relancer !
En réalité, vous ne voyez qu’une chose, vos intérêts de classe, et exigez une fois de plus que nous nous sacrifions pour vos profits.
La CNT Construction de Gironde exige le confinement total et le paiement intégral des salaires ! BASTA !
Pour plus d’infos sur les accidents du travail, on vous conseille :
Voici le témoignage d’un jeune apprenti dans le Bâtiment qui a vécu un accident du travail sur un chantier en Gironde.
> Interview de Sami-20/05/2020
Peux-tu te présenter ?
Je m’appelle Sami F., j’ai 22 ans et je suis en apprentissage BTS enveloppe du bâtiment depuis septembre 2019. J’alterne 3 semaines au CFA de Blanquefort et 3 semaines en entreprise chez Solrenov’.
Pourquoi as-tu choisi le bâtiment ?
J’ai eu mon bac à 18 ans, je n’avais pas un super dossier et n’ai pas été accepté en BTS. J’ai donc été à la fac mais j’ai vite arrêté. J’ai commencé à faire des petits boulots, ça m’a vite saoulé d’être mal payé et de faire des tâches pas intéressantes. J’avais envie alors de reprendre les études.
A l’école j’étais doué, et là je me rendais compte que je gâchais un truc. Je voyais des potes plus âgés qui faisaient ce genre de boulot, qui n’avaient pas vraiment le choix. Et moi j’avais le choix d’être là ou pas. Ils m’ont poussé un peu à partir.
Dans mon dernier boulot j’étais en intérim au chantier naval de Bordeaux et mon chef m’a fait faire des tâches plus intéressantes, m’a donné des responsabilités et je kiffais ça. J’avais oublié ce que c’était de faire un truc intéressant. J’ai donc décidé de chercher un contrat d’apprentissage dans le bâtiment, car il y a du boulot. Moi j’aimais bien gérer les choses, mais pas forcément donner des ordres… je me suis dit qu’être Chef de chantier ou Conduc’ de travaux pouvait me plaire. Je cherchais LE truc parfait mais je ne me lançais pas, j’avais peur de me tromper. Mais il me fallait un boulot donc je me suis lancé, quitte à devoir changer dans 10 ans.
Comment as-tu vécu tes premiers mois d’ apprentissage sur le chantier ?
Dès le début j’ai senti que c’était foireux. Le premier jour d’embauche personne ne savait qui j’étais et je ne connaissais personne, pourtant je m’étais entretenu avec l’entreprise quelques mois avant. Je pensais qu’à mon arrivée on me présenterait les salariés, les équipes…On ne m’a pas fourni d’habits de travail ni d’équipement de protection et finalement un ouvrier se renseigne et je pars travailler avec lui. Heureusement on s’est bien entendus.
Donc sur le chantier ça se passait plutôt bien ?
Oui, lorsque j’ai rencontré le patron pour la première fois, au bout de 3 minutes d’entretien il m’a dit : « c’est bon je te prends ». Moi j’y croyais pas, je galérais depuis des mois à trouver un patron, j’étais content, j’ai sauté sur l’occasion ! On a convenu d’un an de chantier et d’un an de bureau.
Ensuite, on intervenait sur de petits chantiers suite à des sinistres, la sécurité était limitée. Ils duraient un jour, voire une semaine mais pas plus. Ca ne me plaisait pas, mais comme je voulais mon diplôme j’étais prêt à bosser sur le chantier, j’étais conscient qu’il fallait en passer par là.
Connais tu tes droits en matière de sécurité ?
Un peu, je ne voyais pas forcément l’importance de me protéger, jusqu’à ce que quelque chose de lourd tombe sur mon pied et heureusement, j’avais mes chaussures de sécurité. C’est comme ça que j’ai découvert la sécurité. Sur les chantiers je savais que c’était dangereux, beaucoup de décès. On ma prêté une fois des lunettes de protection lorsque j’ai utilisé le marteau-piqueur, mais pas de casque antibruit.
Je me souviens du premier chantier où j’ai eu peur, on posait des panneaux sandwich à dix/quinze mètres de haut à l’aide d’une nacelle, on nous a fait enlever les filets de sécurité avant d’intervenir, à cette hauteur je n’étais pas serein, j’ai commencé à flipper car il suffisait d’un faux pas pour passer au travers. D’ailleurs, le conduc’ a failli tomber, je me suis dit « là c’est chaud », j’ai décidé d’en parler à mes parents et au CFA.
Le CFA a réagi comment ? Ont-ils remonté l’info ?
Les profs m’ont dit de faire attention mais ils n’ont pas fait remonter l’info. Je ne voulais pas trop en parler de peur de passer pour une « victime qui se plaint du travail trop dur »… Mais il y avait un prof, ancien conduc’ chez Bouygues, qui m’a dit d’en parler à mes supérieurs, que c’était à moi de le faire.
As-tu déjà entendu parler de ton droit de retrait ?
Oui bien-sûr mais c’est dur de l’utiliser, je suis nouveau, je dois me faire bien voir, je ne peux pas rester toute la journée dans le camion à rien faire. Un jour j’ai demandé à rester en bas pour découper des panneaux de toiture car on n’avait ni harnais ni filets pour démonter la couverture et le grand vide me faisait vraiment peur.
As tu parlé à ton collègue de tout ça ?
Oui et mon collègue a fait remarquer les problèmes sur la sécurité dans la boîte, mais ça n’a rien changé. J’avais conscience que c’était compliqué pour lui car il était nouveau tout comme moi et espérait une promotion. On prenait des risques, lui avait des enfants en plus. Le pire c’est qu’il n’était même pas couvreur de formation. L’entreprise nous a envoyé en formation sécurité au CFA, la seule qu’on a eue, mais cela n’a jamais été appliqué sur le chantier. J’ai eu l’impression que l’entreprise voulait surtout se protéger en cas d’accident en faisant ça.
As-tu déjà vécu des accidents du travail ?
Oui, l’accident était sur une toiture à Biscarosse, la charpente avait brûlé. On posait des bacs acier pour mettre hors d’eau la maison. On travaillait à environ 10mètres de haut sans harnais, sans filets, ni de gardes-corps. Je suis tombé un matin, je faisais moins attention qu’au début car j’avais un peu plus confiance en moi. Le conduc’ nous faisait comprendre qu’il fallait terminer vite, il nous a dit d’êtres vigilants pour ne pas marcher sur les pointes qui ressortaient des bois au sol… C’était ça pour lui le plus important pour la sécurité ! Ce jour-là, j’étais au faîtage (endroit le plus haut sur la toiture) et je coupais des cales en bois à la tronçonneuse. C’était la fin du chantier, je marchais sur les bacs acier qui étaient déjà posés. Là, je trébuche et me retrouve sur les fesses et je glisse comme sur un toboggan. J’arrive au milieu du toit, j’ai pris de la vitesse, je me rends compte que je n’ai rien pour me rattraper, je me rapproche du vide, tout va très vite, je sais qu’il y a des petits balcons en dessous mais je n’y pense pas sur le moment. Donc je me rapproche du vide, je me suis dit
là ça y est je vais mourir, vraiment.
J’étais d’accord avec le fait que j’allais sûrement mourir. Je ne me vois pas tomber, mais mon pied tape la rambarde du balcon et j’atterris à l’intérieur de celui-ci. Et là je me suis dit « putain je suis sur le balcon » !!!
Mon collègue arrive, lui aussi a eu peur, me demande si je veux aller a l’hôpital, il insiste, je lui dit que ça va mais je passe le reste de la journée dans le camion, sous le choc, pendant que les autres continuent de travailler.
J’ai appris plus tard qu’il est obligatoire d’appeler une ambulance car il peut y avoir des dégâts que tu ne vois pas. Le lendemain je suis allé chez le médecin car j’avais des douleurs aux genoux, au dos, et était en état de choc. Déjà que je n’aimais pas cette boîte, je me suis dit « il faut que je parte de là ». Parfois on se dit que ça n’arrive qu’aux Autres parce qu’ils ne font pas gaffe etc.. mais là ça m’est arrivé à MOI et j’ai vraiment été chanceux ! Si je reste là c’est possible que je retombe, y’a de vrais risques.
J’ai été arrêté deux semaines… pour finalement ne jamais reprendre.
Pour plus d’infos sur les accidents du travail, on vous conseille :
> Billet de (mauvaise) humeur– Accident du travail
Mardi 17 Octobre – Syndicat du Bâtiment et des Travaux publics
On n’en finit plus de compter les sondages qui classeraient la métropole bordelaise en tête de gondole des villes les « plus attractives », « où il fait bon vivre », … Enfin, ça dépend pour qui !
La quartier Bacalan, rebaptisé pour l’occasion quartier « Bassins à Flots », a été ravagé en quelques années par des projets immobiliers monstres dans le but d’attirer des milliers d’habitant-e-s.
Les immeubles sont construits à la va-vite à grand renforts d’intérimaires et de « salarié-e-s détaché-e-s » (cf art. Sud-Ouest du 11 octobre 2017), dont les cotisations sociales sont à hauteur de celles du pays d’origine. Les promoteurs immobiliers et les constructeurs ne comptent pas leur bénéfices (en euros) ni les pertes (humaines).
Le lundi 16 octobre 2017 est survenu un nouvel accident sur un chantier situé rue Delbos (Bordeaux Bacalan). La chute d’un ouvrier maçon, intérimaire, s’est révélée fatale (cf Art. Sud Ouest du 16 oct 2017). Il rentrera parmi les siens entre quatre planches.
Pour rappel, des faits similaires, nous avez fait pousser un coup de gueule il y a quelques mois (On est tou-te-s dans le même bateau?) et nous savons malheureusement que nombre d’ouvrier-e-s meurent dans le plus grand anonymat.
Pour plus d’infos sur les accidents du travail, on vous conseille vivement deux pages intéressantes:
Il faut tout d’abord noter que la sécurité, physique et mentale, au travail est une obligation de résultat de la part du patron (article L.4121-1 code du travail), c’est à dire qu’il est totalement responsable lorsqu’il y a un accident du travail ou maladie professionnelle. Devant cette responsabilité l’employeur tentera de retourner la faute sur l’ouvri-er-ère. Il est donc impératif que l’employeur n’y arrive pas. Il n’existe pas une seule et unique réaction à adopter mais pensons à avoir quelques réflexes.
Face à une situation dangereuse au travail :
En parler avec ses collègues, une réaction collective peut être plus efficace.
Récolter des preuves (photos, témoignages écrits le plus précis possible, noter les entreprises présentes…)
Un-e salarié-e à un droit de retrait face à une situations dangereuse au travail (articles L.4131-1 et suivant code du travail).
Alerter le ou la responsable de la sécurité sur le chantier.
Alerter l’Inspection du Travail (DIRECCTE Aquitaine : 05 56 99 96 12)
En faire part à un syndicat ouvrier.
Face à un accident du travail :
Un accident survenu au salarié-e, quelque soit son contrat, par le fait ou à l’occasion de son travail, quelle qu’en soit la cause, est considéré comme accident du travail (AT).
Exiger des secours immédiatement.
Prévenir ou faire prévenir son employeur dans les 24h.
Récolter des éléments pour reconstituer la scène de l’AT (noter l’heure, la date, les conditions, si possible prendre des photos sur le moment, écrire son point de vue de l’AT, relever les manquements de l’employeur…)
Consulter un médecin du travail ou son médecin traitant pour constater les blessures et séquelles de l’AT.
Exiger de l’employeur une déclaration officielle de l’AT. S’il refuse la déclaration peut être faite par le ou la salarié-e au près de la caisse d’assurance maladie.
Refuser un arrangement à « l’amiable » avec le patron.
Être solidaire avec le ou la collègue, ayant subit l’AT, est sur le moment et par la suite une aide précieuse et nécessaire.
Se faire assister par une aide extérieure (son entourage, conseill-er-ère-s du salarié-e, syndicats…)
Un-e salarié-e peut entamer une action en justice (prud’homme et/ ou pénal) contre l’employeur.
Pour plus d’infos sur les accidents du travail, on vous conseille :
En été, surtout en cas de fortes chaleurs, il faut savoir mesurer son effort, en stoppant les prétentions du patron à « faire suer le Burnous ».
Nos patrons, dont le cerveau a été remplacé par la calculette à profits, sont bien loin de se soucier de nos conditions de travail et bien peu attentifs à garantir notre santé.
Et pourtant c’est bien notre peau que l’on risque, à vouloir, dans le cadre de fortes chaleurs, continuer à répondre à leurs exigences de rentabilité.
En août 2003, lors de la canicule exceptionnelle qui a touché la France, 15 décès probables par coup de chaleur ont pu être dénombrés en milieu professionnel, pour le régime général de la Sécurité sociale, principalement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
En effet, la chaleur augmente fortement les risques d’accidents en induisant une baisse de la vigilance et une augmentation des temps de réaction. La transpiration rend les mains glissantes ou gêne la vue. Il devient alors plus difficile d’effectuer une tâche demandant de la précision et plus risqué de réaliser celle nécessitant un effort physique important.
> Vigilance impérative dès que la température atteint 30° !
S’il n’existe pas de définition réglementaire du travail à la chaleur, au-delà de 30°C pour une activité sédentaire, et 28°C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur constitue un risque évident pour les salariés.
> 3 litres par jour à chaque salarié
Chacun élimine comme il peut, il faut savoir cependant qu’en général, chacun de nous évacue, chaque jour, environ : 1,5 litre d’urine, 0,5 litre de sueur, 0,5 litre par les poumons (sous forme de vapeurs) et par les intestins.
Sur le chantier, le patron doit fournir un point d’eau.
Cette importante élimination de liquide doit impérativement être compensée par des apports équivalents pour que le corps humain (composé à 70% d’eau) puisse continuer à fonctionner. Une perte de poids corporel de 2% liée à la déshydratation fait, tout de suite, chuter les performances (mémoire, attention, etc.).
En cas de fortes chaleurs la déshydratation est le premier risque contre lequel il faut lutter. Elle se manifeste sous différentes formes telles que la sensation de soif intense, de la sécheresse de la peau et des muqueuses et de sensation de fatigue.
> Les réactions physiologiques
Lorsque la température ambiante augmente, la température corporelle a tendance à augmenter et l’’organisme réagit pour maintenir cette température constante en augmentant le débit sanguin et les déperditions calorifiques par la sudation.
En règle générale, les personnes plus âgées, obèses, sous traitements médicamenteux, sans oublier les consommateurs de boissons alcoolisées, sont plus à risque. La chaleur peut également agir comme révélateur ou facteur aggravant de pathologies préexistantes, essentiellement cardiorespiratoire, rénale, endocrinienne (diabète…). Outre la prise de conseils auprès de leur médecin traitant, les travailleurs présentant ces facteurs de risque peuvent bénéficier d’une visite à leur demande auprès du médecin du travail (article R. 4624-17 du Code du travail). En cas de besoin, un aménagement du poste de travail sera proposé.
> Veiller à la santé des collègues
La vigilance de tous doit être mobilisée pour porter secours au salarié victime d’un coup de chaleur. En voici les symptômes :
Niveau 1 : L’œdème de chaleur,
C’est un gonflement par de l’eau des tissus, éventuellement associé à une apparition de minuscules points rouges à la surface de la peau accompagnés de picotements.
Niveau 2 : Les crampes et la syncope de chaleur,
Se manifestent par douleurs musculaires aiguës (jambes et abdomen), et des sensations de vertige et une perte de conscience soudaine et brève, survenant généralement après une longue période d’immobilité ou lors de l’arrêt d’un travail physique dur et prolongé.
Niveau 3 : L’épuisement,
Dû à la chaleur peut avoir de nombreux symptômes : sudation abondante, froideur et pâleur de la peau, sensation de faiblesse, d’étourdissement ou de soif intense, troubles de la vue, nausées, maux de tête, vomissements, pouls faible diarrhées, crampes musculaires, difficultés respiratoires, palpitations, picotements et sensations d’engourdissements dans les mains et les pieds. Il est lié à une perte des tissus en eau et en sels minéraux consécutive à une sudation exagérée.
Niveau 4 : Le coup de chaleur,
C’est un des troubles les plus graves, imputable à un travail prolongé en ambiance chaude. Le coup de chaleur se manifeste par une température corporelle souvent supérieure à 40,6 °C, peau sèche et chaude, pouls rapide et fort, respiration accélérée, maux de tête, nausées, vomissements, peau sèche, rouge et chaude, absence de transpiration, confusion, comportement étrange, délire, voire convulsions, pupilles dilatées, et possiblement à une perte de conscience partielle ou totale.
Son traitement impose une intervention et des soins médicaux immédiats pour préserver les organes tels le cerveau, les reins et le cœur de dégâts irréversibles, voire le décès (15 à 25 % des cas) par défaillance de la thermorégulation.
> Renforcer le collectif de travail
Dès que ces signes d’alerte sont détectés chez un travailleur exposé à la chaleur, il faut agir rapidement. Le premier réflexe doit être d’alerter les secours extérieurs : Samu (15) ou pompiers (18). Puis Amener la victime (si elle peut être déplacée) dans un endroit frais et bien aéré, la déshabiller ou desserrer ses vêtements, lui appliquer de l’eau froide, et si est consciente, lui faire boire de l’eau fraîche. Si la victime est inconsciente mais respire, la mettre en position latérale de sécurité, en attendant les secours.
La solidarité de classe qui veut que l’on prenne collectivement soin de notre santé, doit permettre d’intervenir auprès de camarades qui par leur attitude au travail ou dans leurs consommations (nourriture, boissons, ou addictions diverses) se mettent en danger eux-mêmes mais aussi parfois le collectif de travail.
Une meilleure hygiène de vie pour chacun, ne peut que renforcer la force et la cohésion du groupe.
Inviter des collègues à s’hydrater, ce peut être aussi suggérer de remplacer l’alcool, les sodas par de l’eau,
partager la pause de midi peut donner lieu à la prise de repas collectifs plus légers,
revendiquer des pauses plus fréquentes pour partager des fruits secs …
Rester attentifs aux camarades qui dans le respect de leur religion s’imposent des journées de jeune.
Pour éviter les accidents, les travailleurs doivent bien évidemment aussi agir pour que l’employeur respecte ses obligations de sécurité.
> Obligations patronales
En effet, au regard des articles L. 4121-1 à L. 4121-5 du code du travail, les employeurs doivent prendre les mesures nécessaires visant à assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs qu’ils emploient.
> Prévoir les risques et les anticiper
L’employeur doit évaluer puis consigner dans le document unique le risque « fortes chaleurs » lié aux ambiances thermiques, et bâtir un plan d’action de prévention.
Les salariés revenant d’un congé de maladie, les intérimaires ou les nouveaux embauchés doivent faire l’objet d’une vigilance particulière.
En effet, sous l’effet d’expositions répétées ou prolongées, l’organisme acquiert une meilleure tolérance à la chaleur : c’est le phénomène d’acclimatation ou acclimatement. Le phénomène de transpiration devient plus efficace, les risques de déshydratation diminuent, le coût cardiovasculaire baisse… L’acclimatement, qui réduit les risques liés à la chaleur, est généralement obtenu en 8 à 12 jours.
Toutefois, il n’est que transitoire puisqu’il s’atténue puis disparaît totalement 8 jours après l’arrêt de l’exposition à la chaleur. L’expérience est souvent trompeuse, et fait croire à certains salariés que leur ancienneté dans la profession leur garantie un retour dans des emplois de force sans conséquences. Ce dont il faut se méfier.
> Informer les salariés
L’employeur doit informer, quand il existe, le Comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) des mesures à mettre en œuvre en cas d’épisode de canicule.
L’employeur doit aviser les salariés des risques, des moyens de prévention et des mesures de premiers secours. Mais également les inciter à se surveiller mutuellement afin de déceler rapidement les signes du coup de chaleur.
> Organiser les chantiers en conséquence :
Vérifier, chaque jour, les conditions météorologiques afin d’évaluer le risque.
Aménager les postes de travail extérieurs avec des zones d’ombre ou des aires climatisées. Et en cas de conditions climatiques potentiellement dangereuses (orage par exemple), un abri ou des aménagements du chantier doivent permettre aux salariés de se mettre en sécurité.
Afficher dans un endroit accessible à tous les salariés le document établi par le médecin du travail.
Prévoir des sources d’eau potable fraîche à proximité des postes de travail en quantité et en qualité suffisante.
Réduire des cadences
Augmenter les pauses en périodicité et durée.
Organiser les taches permettant au salarié d’adapter son rythme de travail selon sa tolérance à la chaleur.
Limiter l’isolement des travailleurs.
Multiplier les aides mécaniques à la manutention.
Commencer la journée plus tôt, supprimer les équipes d’après-midi, pour limiter la durée d’exposition aux heures les plus chaudes.
On bosse pas à poil même quand il fait chaud ! Réduire la cadence reste le plus efficace.
> Travail en intérieur
L’employeur doit veiller au renouvellement de l’air pour éviter les élévations exagérées de température.
Dans les locaux à pollution non spécifique, l’aération doit être assurée par ventilation mécanique ou par ventilation naturelle permanente.
L’évacuation des locaux s’impose si la température intérieure atteint ou dépasse 34° en cas de défaut prolongé du renouvellement de l’air (recommandation CNAM R.226).
> Fourniture de protections spécifiques contre les rayons UV
L’employeur doit fournir des tenues de chantier claires, couvrantes (pantalons et manches longues) et permettant l’évaporation de la sueur, constitués avec des matières traitées anti-UV et adaptées à la chaleur, mais aussi des casques à bords larges pour protéger le visage et le cou, et de solides lunettes avec des filtres UV pour ménager les yeux.
Si le patron se montre récalcitrant, ne pas hésiter à le faire suer à son tour
Alerter le CHSCT, s’il existe dans l’entreprise, ou le Délégué du Personnel.
Saisir l’inspection du travail, au titre de l’article R4225-1 du code du travail, pour défaut de prévention.